la force de l’habitude - problématique
par Daniele - terminal L
La force de l’habitude
L’habitude est une acquisition par réitération. Elle se
forme à travers le temps, par la répétition d’actions identiques ou
semblables, qui peuvent devenir un comportement de l’individu. Dire que
l’habitude possède une force c’est dire (en accord avec le sens que ce
terme a en sciences physiques) qu’elle est un moteur de la volonté, un
vecteur qui nous met en mouvement et qui nous pousse à agir. Le sujet
demande donc en quoi l’habitude pourrait augmenter notre pouvoir sur le
réel, à la manière d’un jalon qui permettrait de s’orienter et
d’augmenter notre emprise sur le monde. Pour Aristote, l’exercice
contribue à forger le caractère ; ainsi, pour être moralement juste, il
faut s’entrainer à l’être. Le caractère est le résultat d’un travail
semblable à celui d’un sportif. L’acquisition de bonnes habitudes nous
prémunit donc de la relâche et de l’acrasie (la faiblesse de volonté).
Elle nous est aussi utile dans la vie quotidienne. Pour Maine de Biran,
l’habitude a deux types d’ effets sur nos faculté ; elle attenue d’une
part l’intensité des phénomènes passifs (la douleur) et d’autre part
elle exalte les phénomènes actifs (les gestes ou le raisonnement
logique). En ce qui concerne ces derniers, elle rend plus rapide et plus
facile leur mise en œuvre. Par le processus de mémorisation qu’elle
implique, l’habitude est aussi une astuce qui nous permet de surmonter
aisément certaines situations qui peuvent nous apparaitre difficiles au
début (un jongleur qui mémorise un tour compliqué ou un élève qui doit
faire face à des problèmes en mathématique).
Mais ne risque-t-on pas de tomber dans l’indifférence,
dans une routine ? L’habitude tue la sensibilité et automatise nos
gestes. Elles peut aussi dégénérer en vice. Le vice est un penchant
mauvais, qui par la pratique répétée s’est constitué en habitude. Le
tabagisme et l’alcoolisme sont des formes d’assujettissement de la
volonté qui rendent l’individu esclave de certaines substances. Les
habitudes vicieuses qui affectent le corps sont l’antithèse de la
liberté car il est très difficile de leur échapper une fois acquises.
Ceci est aussi valable en ce qui concerne le domaine intellectuel. Le
plus dangereux dans le phénomène de l’habitude, c’est qu’il risque
d’échapper au contrôle de la conscience en se constituant comme une
seconde nature. La pensée automatique est la marque du conformisme qui
anesthésie la réflexion. Penser mécaniquement c’est penser de façon
encadrée, en restant dans les rails construits par la répétition.
L’habitude peut être à l’origine d’un véritable oubli des soucis du
réel : elle englobe touts les aspects de la vie et rend
intellectuellement paresseux les individus. Il est facile de faire
abstraction du monde en s’en remettant à la réitération irréfléchie,
d’éviter la réflexion qui demande une analyse au cas par cas.
Nous avons envisagé l’habitude dans son aspect de
simplification du réel . Elle permet de nous faire vivre mieux car elle
automatise nos gestes mais elle risque aussi de nous paralyser et de
nous entrainer dans une routine. En tout cas, c’est en elle que le passé
se conserve : les gestes effectués par habitude sont des copies de
gestes mémorisés.
L’habitude n’est pas pour autant ennemie du progrès : ce
n’est qu’en conservant le passé que nous pouvons le dépasser.
Intérioriser le passé c’est l’acquérir : en agissant selon des
habitudes, nous donnons pour acquis certains mécanismes, sans avoir
besoin de revenir sans cesse en arrière. Et peut-être qu’il est
impossible de vivre toujours de façon nouvelle, en improvisant notre
comportement, sans références. L’habitude structure le sujet, assure la
cohésion de l’individu autour d’actions-repères ou de pensées-repères.
Nous avons besoin d’elle pour exister comme individualité face au monde,
mais nous devons toujours nous soucier de ne pas nous laisser aller à
une vie d’automate.